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La Transition: Histoire d’une idée – par Pablo Servigne

Posté le 23 August 2012 par Alexis Nolet

Article rédigé par Pablo Servigne, intervenant du cycle d'introduction sur les initiatives de transition, publié sur le site de l'asbl Barricade - Téléchargez l'article avec ses références, en format pdf.

Les crises se succèdent et s’amplifient. Le monde craque de partout. Nombreux sont celles et ceux qui désirent inventer un autre mode de vie. Mais comment changer le « système » ? Comment en imaginer un autre ? Que faire concrètement ? Certains ont déjà commencé le chantier de reconstruction : c’est le mouvement des « villes en transition ». L’idée se répand depuis trois ou quatre ans à travers le monde, s’invite à tous les débats et suscite beaucoup d’enthousiasme. Mais une transition vers quoi ? D’où vient cette idée ? En quoi est-elle originale ? Petit détour historique.

Au 16e siècle, les élites européennes prennent conscience que la Terre est ronde et qu’elle tourne autour du soleil. Elle est finie et n’est plus le centre de l’univers. L’angoisse existentielle de l’humanité ne fera alors que grandir. Darwin montrera que tous les êtres vivants sont nos cousins et que nous ne sommes qu’une petite branche perdue dans le grand buisson de la vie. Freud découvrira que ce n’est même pas la raison qui guide la plupart de nos comportements. Plus récemment, les éthologues prouveront que le rire, la culture ou l’utilisation d’outils ne sont même plus le propre de l’humain. Nous n’avons pas non plus fini d’entrevoir l’étroitesse de notre petit « vaisseau spatial ». Ces dernières années, nous découvrons la fragilité d’une Terre aux ressources très peu renouvelables, l’irréversibilité des dégâts qu’on lui inflige et surtout la fin de l’ère de l’énergie disponible à volonté.

Depuis 40 ans, la conscience écologique tente avec grand peine de raisonner un système économique irrationnel, injuste et débridé. Même si elle a considérablement gagné en puissance ces dernières années, cette conscience écologique ne s’est pas faite en six jours. Voici quelques grandes étapes qui, sans prétendre retracer la pensée écologiste, permettent de comprendre d’où vient l’idée de Transition, ou plus précisément, de comprendre en quoi nos sociétés sont capables aujourd’hui de comprendre et même d’adopter cette idée.

1972 : la croissssance a des limites

C’est dans le creuset du célèbre MIT (Massachussets Institute of Technology, USA) que se forme un groupe de recherche international, le Club de Rome, qui se donne pour objectif de modéliser le système « monde » avec tous les outils modernes d’informatique, de cybernétique et les connaissances les plus récentes en économie, industrie, agriculture et démographie. Ils rédigeront un rapport devenu célèbre, The limits to growth (les limites de la croissance), qui conclut que « si les taux de croissance (de l’époque) de la population mondiale, de l’industrialisation, de la pollution, de la production de nourriture, et de l’épuisement des ressources demeurent inchangés, les limites à la croissance sur cette planète seront atteintes au cours des 100 prochaines années. La conséquence la plus probable sera un brusque et incontrôlable déclin à la fois de la population et de la capacité industrielle ». Ils ajoutent – c’est important – qu’il est possible de changer ces paramètres pour trouver un juste équilibre de stabilité écologique et économique qui satisfasse tout le monde. Si l’on décide d’opter pour ce second scénario, alors ses chances de succès seront plus grandes si l’on s’y met rapidement.

Le monde prend donc acte que la croissance économique est limitée. Sacré choc ! Cette idée va rester gravée dans la conscience collective, on commencera déjà à murmurer qu’il faudrait effectuer une transition vers un autre modèle… Mais malheureusement cela ne pas débouchera pas sur des mesures politiques concrètes.

Le grand bond en arrière

Les années 70 sont aussi celles des premiers chocs pétroliers. La société occidentale entrevoit la fin de l’ère du pétrole, mais ne veut pas y croire. Déjà à l’époque, les solutions proposées par les écologistes pour vivre de manière équilibrée et économiser l’énergie existent déjà. Mais elles sont discrètement mises sous le tapis par les pouvoirs en place. On se replie sur les sources de pétrole du Moyen Orient, l’équilibre géostratégique change, souvent au profit de guerres (du Golfe par exemple) et la perfusion massive de l’économie recommence.

La vague néolibérale des années 80 (Reagan, Thatcher) replonge les sociétés dans la croissance en agitant l’épouvantail du chômage, l’économie se mondialise, la finance gagne en puissance. Mais les peurs du pic pétrolier et surtout d’une crise systémique disparaissent, c’est surtout cela qui compte. En 1987, l’imposture prend explicitement un nom avec l’invention du « développement durable », un terme rendu populaire par le « rapport Bruntland» . Quarante années seront ainsi perdues.

2002 : la décroissssance parle français

Dans le milieu francophone, la critique radicale issue de la prise de conscience des années 70 prend plutôt le nom « d’après-développement », une réflexion théorique qui a cheminé « de façon quasi souterraine entre 1972, grande époque des précurseurs (Nicholas Georgescu-Roegen, Ivan Illich & André Gorz) et 2002, l’année du colloque à l’UNESCO “ Défaire le développement, refaire le monde ”, acte de naissance du mouvement de la décroissance ». Ce mot décroissance, qui a été forgé en 2002 afin de ne pas être récupéré par les économistes « classiques », devient alors la bannière derrière laquelle se construisent des critiques radicales du système économique et les propositions pour une économie relocalisée plus humaine. Mais dans le monde anglo-saxon, l’imaginaire et les mots utilisés ne sont pas les mêmes…

2005 : le retour du pic

Symboliquement, on peut fixer à 2005 la nouvelle prise de conscience du problème énergétique, date à laquelle l’équipe de Robert Hirsch rend son rapport au Département de l’Énergie du gouvernement des États-Unis d’Amérique. Le rapport Hirsch est sans appel et ne pourra plus être ignoré : le pic de pétrole arrivera bientôt et sera brutal. Il touchera de plein fouet les États-Unis. « Le pic de production mondiale de pétrole donne aux États-Unis et au monde un problème de gestion des risques sans précédent. À l’approche du pic, les prix des carburants liquides et la volatilité des prix va augmenter considérablement, et, sans mesures d’atténuation mises en place à temps, les coûts économiques, sociaux et politiques seront sans précédent. Des mesures crédibles d’atténuation

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des conséquences existent à la fois sur l’offre et sur la demande, mais pour avoir un impact substantiel, elles doivent être mises en place plus d’une décennie avant le pic pétrolier. »

Le vrai problème est qu’aujourd’hui, nous sommes très probablement en train de passer le pic du pétrole. Selon l’Agence Internationale de l’Énergie, le pic aurait été passé en 2006 ! (rapport 2009). Mais le pétrole n’est pas le seul problème : dans une vingtaine d’années, il se pourrait que nous passions le pic du gaz naturel, et dans une quarantaine d’années le pic de l’uranium (si toutefois on continue à investir dans l’énergie nucléaire…). Et c’est aussi oublier les autres ressources stratégiques comme le phosphore, indispensable à l’agriculture industrielle, qui commence déjà son déclin. Certains auteurs suggèrent par conséquent des effets importants de ces pics sur la société : un déclin de la croissance, de l’approvisionnement en eau potable, de la santé publique ou même de la population mondiale …

Le rapport Hirsch marquera quelques élus ou experts, dont les plus connus sont Richard Heinberg ou Yves Cochet, qui s’efforceront alors de rendre publique cette idée. Mais il auront le plus grand mal car personne ne veut entendre la mauvaise nouvelle. Le problème de l’énergie et du pic pétrolier n’a pas vraiment eu d’impact sur les médias, et étrangement assez peu chez les écologistes francophones. Pour ces derniers, la préoccupation principale est surtout le changement climatique.

2006 et 2007 : le réchauffement s’invite à la fête

Il est clair que les urgences écologiques reviennent en force dans les années 2000. Mais alors que le problème de la couche d’ozone ne fait jamais vraiment beaucoup de bruit, et que les marées noires (Erika et Prestige) sont traitées comme des événements ponctuels, c’est le problème global du changement climatique (et du co2) qui va envahir les médias.

Au fil des années, le monde scientifique s’accorde sur un consensus : le réchauffement est un fait, les activités humaines en sont la cause, le problème est global, et les conséquences sont potentiellement désastreuses. Mais alors que ces résultats ont du mal à pénétrer les sphères des élites (et surtout les cerveaux d’économistes), deux événements médiatiques majeurs vont graver le réchauffement climatique dans les consciences. En 2006, la publication (à la demande du gouvernement britannique) du rapport de l’économiste Nicolas Stern bouleverse le monde de l’économie. L’avantage de Stern, c’est qu’il parle le langage des économistes : il montre que des actions préventives fortes et massives contre le réchauffement climatique coûteront beaucoup moins cher qu’un laissez-faire. Pour lui, ce problème est potentiellement la plus grande « défaillance de marché » que le monde économique aura à subir. Pire, en 2008, Nicolas Stern reconnaît avoir gravement sous-estimé l’ampleur des risques climatiques ! À cette époque, on commence même à parler de « transition vers une économie post-carbone »… L’autre événement majeur, c’est l’attribution en 2007 du prix Nobel de la paix au groupe du GIEC et à Al Gore, au moment où le film de ce dernier se diffuse sur les écrans du monde entier.

À partir de ce moment, le réchauffement climatique ne sera plus jamais ignoré des médias et de la conscience collective.

2008 : pic pétrolier et changement climatique sont inséparables

En 2008 paraît le Manuel de Transition, le livre fondateur du mouvement des Villes en Transition. Son auteur, Rob Hopkins, remarque que certains écologistes ont une étrange tendance à minimiser ou occulter l’un ou l’autre des deux problèmes. Si l’on reste sur la logique du changement climatique sans prendre conscience du pic pétrolier (rapport Stern), on peut être amené à proposer des solutions comme la capture et le stockage du carbone, la compensation des émissions par la plantation d’arbres, les bourses au carbone, l’amélioration de la logistique des transports ou pire, l’énergie nucléaire !

Alors que si l’on ne prend en considération que le pic pétrolier (rapport Hirsch), on trouve alors logique de favoriser l’utilisation du charbon et du gaz liquéfié, des sables bitumineux ou des agrocarburants, ou par exemple, d’assouplir la réglementation des forages.

Les problèmes sont différents et les solutions de chaque « camp » sont souvent incompatibles. Pour reprendre l’analogie de Richard Heinberg, un spécialiste du pic pétrolier, « au niveau superficiel, nous pourrions dire que le changement climatique est la question de ce qui sort du tuyau d’échappement, tandis que le pic pétrolier est la question de ce qu’on met dans le réservoir d’essence ». Pour Rob Hopkins, « il est essentiel d’accorder une égale importance au changement climatique et au pic pétrolier dans toutes nos décisions à venir ». Prendre les deux problèmes ensemble, c’est se diriger vers des solutions systémiques, telles que la relocalisation planifiée de l’économie, des quotas énergétiques négociables, des infrastructures énergétiques décentralisées, une production alimentaire locale, une planification de la descente énergétique, etc . Bref, un nouveau « système ».

Rob Hopkins remarque judicieusement que « le changement climatique nous dit que nous devrions changer, tandis que le pic pétrolier nous dit que nous allons être forcés de changer ». Il ajoute qu’il est « intéressant de constater que le changement climatique est aujourd’hui rapidement pris en compte par les entreprises et de plus en plus par les gouvernements. […] L’idée que l’on peut maintenir l’économie mondialisée tout en se contentant de réduire ses émissions de gaz carbonique d’année en année est attrayante, elle est même maintenant vue comme essentielle pour rester en tête de la compétition. Mis à part le gouvernement de la Suède et peut-être celui de l’Irlande, il ne se trouve pas de gouvernement ou d’entreprise qui ait vraiment pris en compte le pic pétrolier ou même admis son existence, tout au moins en public, parce que le modèle économique que tous observent aura grand peine à s’y adapter. Pour cette raison, l’impulsion pour la réduction des émissions de gaz carbonique procède dans une large mesure de haut en bas, tandis que les réponses au pic pétrolier, parce que celui-ci est plus difficile à digérer par les gouvernements et l’industrie, semblent davantage procéder du bas vers le haut."

2007 - 2010 : il faut changer le système

La crise de l’éclatement de la bulle financière américaine (subprimes) de l’été 2007 a marqué les consciences. Car en plus d’une crise de confiance mondiale, elle a mis à jour l’interdépendance de tous les pays ainsi que la fragilité, l’injustice et l’absurdité du système financier mondial. En 2008, la crise a même eu des conséquences sur les prix des denrées agricoles mondiales et a donc remis le problème de la sécurité alimentaire à l’ordre du jour. Depuis, il ne se passe pas une année sans l’émergence d’un grand mouvement social en Europe : les retraites en France, la révolte contre les mesures d’austérité en Grèce, l’éclatement de la bulle immobilière en Espagne, etc. Toutes ces manifestations font le constat qu’il faut changer de système. Mais l’impasse dans laquelle nous nous trouvons provoque un sentiment d’impuissance angoissant.

Une autre idée se confirme et s’ajoute à cette angoisse : le capitalisme repeint en vert est lui aussi une impasse. Il est vrai que « l’idée que l’on peut maintenir l’économie mondialisée tout en se contentant de réduire ses émissions de gaz carbonique d’année en année est attrayante». Mais dans son indispensable ouvrage, Tim Jackson marque son époque en dressant les lignes directrices d’une refondation de la macroéconomie découplée de la croissance. Il montre surtout que le développement d’une technologie plus efficace et moins polluante ne réglera pas le problème écologique. C’est le même constat que fait Daniel Tanuro: le capitalisme vert est tout aussi dangereux pour la terre que pour l’équilibre social. Les défis sociaux et environnementaux sont désormais indissociables. On en revient à notre « système » qu’il faut changer.

Face à ce problème global dont personne ne sait vraiment par quel bout le prendre, c’est un sentiment d’impuissance qui nous envahit. Que faire ? Faut-il voter ? Pour qui ? Faut-il faire la révolution ? Quels modèles avons-nous à notre disposition ? Tout compte fait… sommes-nous simplement capables d’imaginer l’avenir ? Et comment sortir de cette peur paralysante ?

2008 : la clé est psychologique

« Quand vous entendez les mots “ changement climatique ” et “ pic pétrolier ”, quel effet ont-ils sur vous ? Quels sont les impulsions ou les instincts qu’ils provoquent chez vous ? Si je dois deviner et si vous êtes comme la plupart des gens à qui j’ai posé la question, ces mots font surgir des sentiments d’impuissance, de tristesse, de lassitude et l’impression d’être placé devant quelque chose d’énorme et d’effrayant sur quoi vous vous estimez incapable d’exercer une quelconque influence. Ce n’est pas dans cet état d’esprit qu’il faut partir si nous voulons accomplir quelque chose, faire quelque chose ou créer quelque chose. Car il ne tend pas à produire une action dynamique appliquée, et nous devons pour cela nous sentir motivés et inspirés. En bref, nous sommes sur le point d’affronter la tâche la plus importante de l’histoire, et nous y sommes on ne peut plus mal préparés.

L’esprit humain a cela de particulier que lorsqu’on lui demande de changer un comportement nuisible, il ne le fera pas tant qu’il ne verra pas une alternative crédible. Il est têtu au point même de s’autodétruire. La raison paraît impuissante face à ce mécanisme de repli. Certains auront beau expliquer, démontrer, prouver, argumenter que le mode de vie occidental est nuisible, si la plupart des gens n’entrevoient pas une autre solution, ils ne changeront pas. L’une des grandes avancées du mouvement des Villes en Transition est sans aucun doute d’avoir su « débloquer » notre esprit et le tourner vers des actions positives, concrètes et libératrices. « Notre meilleure chance de nous occuper efficacement du changement climatique et du pic pétrolier proviendra de notre aptitude à encourager les gens à voir dans la transition […] une aventure dans laquelle ils peuvent investir espoir et énergie. »

Cette préoccupation de contourner les barrières psychologiques et d’adopter une vision positive de l’avenir est l’aspect le plus original et le plus fascinant de la Transition. À la manière de Tim Jackson qui voit l’avenir sans croissance mais avec prospérité (espoir en l’avenir), « le message essentiel à retenir [du manuel de transition] est que l’avenir avec moins de pétrole pourrait être meilleur que le présent, mais seulement si nous nous mettons à concevoir cette transition avec suffisamment de créativité et d’imagination".

L’autre aspect « positif » de la Transition est ce souci de ne pas nourrir la critique, de ne pas produire de discours de dénonciation, d’éviter de nommer les ennemis, et de se contenter de construire. La critique n’est pas le rôle des « transitionneurs », il y a déjà beaucoup d’associations et de partis qui le font très bien ! Il est normal que cela perturbe certains militants habitués des conflits sociaux et des rapports de force. Mais nous sommes ici dans une conception pragmatique du territoire entièrement tournée vers l’action. Comme le dit l’agroécologiste Pierre Rahbi, « la meilleure façon de m’insurger a été de tenter de construire d’autres choses, avec une autre logique ». Ne pas rester dans l’opposition, mais bâtir dès maintenant, et commencer avec ses voisins, voilà la Transition.

2008 - 2009 : réinventer nos mythes

En réalité, tout n’est pas si simple que cela. Toucher à la psychologie du changement c’est bien, mais il s’avère aussi utile d’aller encore plus en profondeur, et de toucher aux fondements mêmes de nos comportements. Nous les humains, raffolons des histoires. On nous en raconte depuis la plus tendre enfance, et ces histoires deviennent nos références, et rendent notre monde cohérent. Chaque société fonctionne avec quelques histoires que l’on se transmet de génération en génération, ce sont les mythes. Un mythe est une histoire que nous avons tellement bien intégrée qu’elle est devenue invisible !

Malheureusement, notre société n’en connaît qu’un : le mythe du progrès. Vous le connaissez tous, il dit que l’avenir sera meilleur demain parce que la science et la technique trouveront des solutions. On l’appellera le mythe « Star Wars ». En deux mots, vous avez compris : l’avenir de l’humanité pourrait bien se trouver sur d’autres planètes, la technique nous sauvera. « Ils trouveront bien quelque chose ».

Cette histoire a aussi son versant obscur, c’est le mythe de l’apocalypse ou de l’effondrement. C’est l’histoire d’un paradis perdu à cause d’un péché originel, puis une lente dégradation et enfin un effondrement généralisé qui permettra à quelques élus de retrouver le paradis perdu. Ce scénario tourne en boucle dans les principales religions monothéistes, et même chez les marxistes (le péché originel étant l’invention de la propriété privée, et le paradis attendu, la révolution) ou même chez les néo-primitivistes (le péché étant l’invention de l’agriculture qui a sédentarisé les sociétés et formé des méga-machines qui s’effondreront et permettront le retour au paradis des chasseurs-cueilleurs). Concernant la peur de la fin du pétrole, ce scénario fonctionne d’autant mieux que l’industrie du cinéma nous en a même donné les images : c’est le scénario « Mad Max ». Deux mots suffisent pour comprendre, c’est ça le pouvoir de l’imaginaire.

En 2008, un livre de John Michael Greer vient perturber ces deux histoires : en réalité, pour cet auteur assez lucide, l’avenir sera très probablement un déclin énergétique lent de deux ou trois cents ans qui oscillera entre phases de régression et petites phases de léger progrès. C’est ce qu’il nomme « la longue descente ». Il n’y aura pas d’effondrement généralisé et il ne faut pas non plus s’attendre à un progrès technique. Une autre originalité du mouvement de la Transition est qu’il assume que son discours ne soit pas toujours prometteur d’émancipation.

La Transition est donc un effort d’imagination, un effort collectif d’anticipation du meilleur scénario : ni Mad Max, ni Star Wars. Il reste cependant à l’inventer dès maintenant, localement, et avec nos voisins. Imaginez un nouveau type d’économie, qui soit stable dans le long terme mais toujours actif dans un contexte mondial, riche en emplois de qualité, une vie remplie de sens, des infrastructures inépuisables en énergie… Choisissez votre chemin, visualisez-le, et rendez-le réel par vos actions. Voilà encore un visage de la Transition. Changez les mythes pour changer le monde. C’est précisément ce que Serge Latouche, le principal théoricien de la Décroissance, appelle de ses voeux en invitant à « décoloniser l’imaginaire ». Écrire, conter, imaginer, faire ressentir… Il y aura aussi du travail pour les artistes durant

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la Transition !

2008 : le concept de résilience

L’autre grande nouveauté de la Transition, c’est la résilience. C’est un concept très utile emprunté à la physique et repris par l’écologie scientifique et la psychologie qui peut se définir comme « la capacité d’un système à absorber une perturbation et à se réorganiser en intégrant ce changement, tout en conservant essentiellement la même fonction, la même structure, la même identité et les mêmes capacités de réaction ». La résilience désigne simplement la capacité d’un écosystème à résister aux chocs et aux changements. La Transition invite alors à construire de la résilience plutôt que de limiter les émissions de carbone : c’est psychologiquement plus positif et socialement plus constructif.

Comment augmenter la résilience d’une région ou d’une communauté ? « L’expérience écologique répond que, dans un domaine, la spécialisation permet d’accroître les performances mais fragilise la robustesse de l’ensemble. Au contraire, la diversité renforce la résistance et les capacités d’adaptation. Réintroduire les jardins potagers, la polyculture, l’agriculture de proximité, des petites unités artisanales, la multiplication des sources d’énergie renouvelable, renforcent la résilience. Deux institutions humaines apparaissent de façon récurrente à travers les vicissitudes de l’histoire et témoignent d’une extraordinaire résilience, l’une rurale, la petite exploitation paysanne autosuffisante, l’autre plus urbaine, l’atelier artisanal".

Favoriser la diversification et l’autosuffisance signifie renforcer l’autonomie des localités (quelles que soient les divisions que les communautés choisissent). Ne pas dépendre d’une seule source de richesse ou d’approvisionnement, voilà le secret. Il ne s’agit pas pour autant de s’enfermer dans l’autarcie. « Le retour au local ne sera pas un processus isolationniste consistant à tourner le dos à la communauté mondiale. Il consistera plutôt à amener les communautés et les nations à se rencontrer à partir d’un lieu qui n’en soit pas un de dépendance mutuelle mais de résilience accrue ». Au final, ce concept une fois compris, permet de visualiser un avenir concret. « Une résilience accrue et une économie locale renforcée ne signifient pas l’édification de murailles autour de nos villes ni le refus d’y laisser entrer ou sortir quoi que ce soit. Ce n’est pas le rejet du commerce ni une sorte de retour à une version idyllique d’un passé imaginaire. Il s’agit plutôt d’être mieux préparés pour un avenir plus sobre, plus autosuffisant et qui favorise ce qui est local au lieu de ce qui est importé".

Bref, une anticipation radicalement concrète

Ce petit détour historique ne présente, bien entendu, qu’une vision subjective de la Transition et chacun sera libre de la discuter. Le concept sera même amené à changer, mûrir, évoluer, muter, mais (il faudra faire attention) il sera facilement récupérable par les actuels hérauts de l’ordre établi. Il ne faut pas oublier que les batailles se jouent surtout sur le terrain sémantique. Le mot « Transition » étant volontairement très neutre pour qu’un maximum de gens puisse l’adopter, il est aussi facilement récupérable, de la même manière que l’a été le « développement durable ». Il est donc important de bien saisir dès à présent son sens, ses implications et son histoire pour en cerner les enjeux et le garder fonctionnel durant au moins les 40 prochaines années !

Pour résumer, la Transition est un concept et un mouvement récent, d’origine anglo-saxonne bien qu’il se répande à grande vitesse partout ailleurs. On parle actuellement près de 800 villes officiellement en Transition dans le monde (dont une favela au Brésil !). Même si l’idée d’effectuer une transition était dans l’air depuis les premiers chocs écologiques, c’est surtout le Manuel de Transition de Rob Hopkins qui a formalisé le concept de la manière la plus complète et la plus intéressante.

Voici les quatre prémisses sur lesquelles est fondée la Transition décrite dans ce manuel:

On part donc du postulat que les conditions extérieures nous obligeront à changer radicalement de mode de vie dans un futur proche. Alors plutôt que de subir ce changement, il s’agit de l’anticiper et de le préparer dès à présent. « Le modèle de la transition se base essentiellement sur le fait de donner aux citoyens du temps et des ressources nécessaires pour réfléchir et agir ». Christian Arnsperger poursuit son invitation à la transition en ajoutant que même si elle implique un changement profond des institutions et de nos modes de vie, la Transition ne force pas les gens à changer selon un mode de vie préétabli au nom de la « durabilité » ou d’un quelconque autre slogan. Cette anticipation, pensée et vécue collectivement, puis transformée localement en actions, c’est cela la Transition.

Le mouvement de la Transition est-il politique ? Non ! s’empresseront de répondre certains. Mais si ! répondront d’autres. À la différence des objecteurs de croissance qui ont (entre autres actions) formé un mouvement politique, le mouvement des Villes en Transition ne tente pas de changer le monde par le « haut », mais au contraire naît de l’organisation locale des citoyens. En cela, le mouvement pourrait être qualifié d’« apartidiste », à la manière des « Indignados » des places d’Europe (mai 2011). Mais par le fait que le mouvement change le monde et l’organisation sociale des communautés, on peut dire qu’il est politique au sens noble du terme. Cela ne signifie pas qu’il évacue d’un revers de main les conflits sociaux et les rapports de force entre classes. La grande force du mouvement de la Transition est qu’au moment des rapports de force, il aura des arguments concrets à proposer : une expérience de terrain, des modèles économiques naissants, et pourquoi pas, la réappropriation des moyens de production des conditions de base de la vie, qui permettront le luxe de pouvoir refuser le vieux modèle. Ce rapport au politique est une importante question que nous ne manquerons pas de traiter dans une autre analyse.

Bref, la Transition n’est ni une révolution brutale, ni une révolte, ni un effondrement généralisé, pas plus un changement par « le haut » dirigé depuis des instances lointaines avec un programme précis. C’est plutôt un changement progressif de relocalisation de l’économie, par « le bas », diversifié, lent, constructif, pacifique et radical (car elle prend le problème à la racine). C’est imaginer, programmer et construire localement une descente énergétique qui prendra 30 ou 40 ans et nous conduira à l’ère « post-carbone ». Ne pas faire table rase signifie forcément qu’il y aura des compromis utiles à faire et des rapports de force à gérer. Personne ne sait vraiment quels chemins seront empruntés, puisque les choix se font sur place avec les personnes présentes.
Il n’y a pas de programme officiel.

La Transition est une vision positive et pragmatique de l’avenir. En fait, c’est bien plus qu’une idée, c’est du concret ! On peut même s’aventurer à dire que c’est le défi de notre génération.

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